La finance islamique est un système financier qui repose sur les principes de la charia (loi islamique), en interdisant notamment l’intérêt (Ribâ) et en promouvant des investissements éthiques et responsables. Contrairement aux systèmes financiers traditionnels, elle valorise l’équité, la justice et le partage des profits et des pertes dans toutes les transactions. Bien que la finance islamique soit aujourd’hui un secteur en plein essor, ses racines plongent profondément dans l’histoire. De la période médiévale à son développement moderne, la finance islamique a toujours cherché à harmoniser les préceptes religieux avec les pratiques économiques.
Aux origines
Même si la finance islamique moderne est souvent perçue comme un phénomène récent, il existe des traces de ce que certains appellent un capitalisme islamique entre le VIIIe et le XIIe siècle. À cette époque, le commerce était florissant dans le monde islamique, notamment grâce à l’usage du dinar. Cette monnaie a joué un rôle clé en facilitant les échanges commerciaux entre différentes régions, rapprochant des économies qui, auparavant, étaient isolées les unes des autres.
Des techniques bancaires avancées, telles que les lettres de change, les partenariats, les chèques et les billets à ordre, étaient déjà utilisées dans le monde islamique médiéval. Ces pratiques ont jeté les bases de ce qui allait devenir la finance islamique moderne. Les concepts économiques islamiques de cette période, notamment ceux relatifs à l’interdiction de l’usure (Ribâ), ont progressivement évolué pour former une approche unique de la finance.
Le Ribâ, qui signifie usure, est défini par la charia comme une « plus-value sans contrepartie ». Bien que l’application des intérêts ait parfois été permise dans des situations spécifiques, comme pour des devises garanties par des métaux précieux, la finance islamique restait fondamentalement opposée à tout excès financier ne reposant pas sur un bien tangible.
La finance islamique moderne
L’idée d’une réforme financière basée sur le partage des profits et des pertes plutôt que sur l’intérêt a commencé à prendre forme dans les années 1940. Les penseurs et juristes de l’époque ont élaboré des théories visant à restructurer le système bancaire en conformité avec les valeurs islamiques, tout en reconnaissant la nécessité de composer avec la réalité économique moderne.
L’Égypte a été l’un des premiers pays à expérimenter la mise en pratique de ces idées avec la création, en 1963, de la caisse d’épargne de Mit Ghamr, un projet d’épargne fondé sur l’intéressement. Cette expérience a ouvert la voie à l’essor de la finance islamique dans d’autres pays.
Dans les années 1970, la finance islamique s’est institutionnalisée avec la création de la Banque islamique de développement en 1975, une organisation intergouvernementale visant à financer des projets dans les pays membres. Cette même année a vu la naissance de la Dubai Islamic Bank, première banque commerciale islamique moderne.
L’essor de la finance islamique a ensuite été marqué par une implication croissante des institutions financières et des gouvernements musulmans, avec des conférences internationales et des études approfondies sur l’économie islamique, notamment à La Mecque, Londres et Karachi. Ces efforts ont permis de transformer les théories de la finance islamique en pratiques concrètes, favorisant l’émergence d’un secteur bancaire halal.
Aujourd’hui
La finance islamique connaît une croissance exceptionnelle, avec une progression de 10 à 15 % par an. Actuellement, plus de 300 institutions bancaires dans 51 pays gèrent des actifs conformes à la charia, représentant plus de 822 milliards de dollars. Cette croissance rapide en fait l’un des secteurs financiers les plus dynamiques au monde.
Le secteur de la finance islamique attire également l’attention des pays non musulmans, avec des places financières comme le Luxembourg et le Royaume-Uni qui adaptent leurs législations pour faciliter le développement de ces banques éthiques. L’intérêt croissant pour des investissements responsables et éthiques, combiné aux performances solides du secteur, suggère que la finance islamique continuera de jouer un rôle clé dans l’économie mondiale dans les années à venir.
Conclusion
La finance islamique s’est développée à partir d’une histoire riche, en adaptant les principes religieux aux exigences économiques modernes. De ses racines dans le monde médiéval à son essor actuel, elle incarne une vision éthique et responsable de la gestion financière. Aujourd’hui, elle continue de croître, répondant à la demande croissante de solutions d’investissement conformes aux valeurs islamiques. En s’appuyant sur des principes de justice, de partage des profits et des pertes, et d’investissement tangible, la finance islamique offre une alternative solide et prometteuse aux systèmes financiers traditionnels.
Bibliographie
- Mawdudi, (1940), Anwar Qureshi (1946), Naiem Siddiqi (1948), Mahmud Ahmad (1952), Mawdudi (1950), Muhammad Hamidullah (1944, 1955, 1957 et 1962)
- Muhammad Uzair (1955), Abdullah Al-Araby (1967), Nejatullah Siddiqi (1961, 1969), Al-Najjar (1971), Baqir Al-Sadr (1961, 1974)
- « Sharia calling« . The Economist. 2009-11-12.