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La crise de la dette, qu’est ce que c’est ?

crise de la dette

La dette publique et privée atteint des niveaux historiques, alimentant un débat croissant sur la soutenabilité financière à l’échelle mondiale. Après les chocs successifs de la pandémie, de la guerre en Ukraine et de l’inflation persistante, la question n’est plus seulement celle de la croissance, mais celle de la capacité des États et des entreprises à refinancer leurs engagements. L’alerte est désormais partagée par les institutions internationales, les banques centrales et les agences de notation 1, qui craignent que la prochaine crise financière trouve son origine dans l’excès d’endettement accumulé depuis plus d’une décennie.

Une dette mondiale à des niveaux records

Selon l’Institut de la finance internationale 2, la dette mondiale a franchi au second trimestre 2024, la barre des 320 000 milliards de dollars, soit plus de 330 % du PIB planétaire. Les économies avancées portent la plus grande partie de ce fardeau, mais les pays émergents voient également leurs ratios exploser sous l’effet du ralentissement de la croissance et du renchérissement du crédit. L’OCDE 3 souligne que l’endettement public des membres du G7 dépasse aujourd’hui 120 % de leur PIB, un niveau comparable à celui observé après la Seconde Guerre mondiale.

Cette dynamique est alimentée par des taux d’intérêt encore élevés, conséquence des politiques monétaires restrictives adoptées pour juguler l’inflation. Si l’assèchement de la liquidité mondiale a permis de freiner la hausse des prix, il a aussi renchéri le coût du service de la dette, fragilisant des États déjà confrontés à des dépenses publiques croissantes, notamment en matière de transition énergétique et de défense.

Les pays les plus exposés

La zone euro reste particulièrement vulnérable. L’Italie affiche un endettement proche de 140 % du PIB, tandis que la France a vu sa perspective de notation abaissée à « négative » par Standard & Poor’s 4 début 2025. Ces signaux rappellent que la soutenabilité budgétaire constitue un enjeu central pour la stabilité de la monnaie unique. L’Espagne, malgré une croissance plus dynamique, peine encore à réduire ses déséquilibres structurels.

Au-delà de l’Europe, plusieurs pays émergents connaissent des tensions aiguës. L’Argentine demeure en défaut partiel, le Sri Lanka négocie un allègement de sa dette avec le FMI, et des États africains comme le Ghana ou la Zambie multiplient les restructurations. Le renchérissement du dollar, renforcé par la politique de la Réserve fédérale, accentue ces pressions, puisque la plupart de ces dettes sont libellées en devises étrangères.

Les marchés financiers sous pression

La montée des primes de risque traduit les inquiétudes des investisseurs. Les spreads obligataires entre les pays du sud de l’Europe et l’Allemagne se sont creusés au premier semestre 2025, signalant une fragmentation accrue du marché de la dette souveraine. Sur les marchés émergents, la volatilité reste forte, notamment pour les pays dépendants des importations d’énergie et des financements extérieurs.

Dans le même temps, les banques commerciales et les gestionnaires d’actifs réduisent leur exposition aux obligations jugées les plus fragiles, ce qui accentue les tensions de refinancement. L’augmentation des défauts d’entreprises dans des secteurs endettés, comme l’immobilier et l’énergie, contribue à nourrir le risque de contagion au système financier mondial.

Quelles réponses politiques ?

Face à ce contexte, les banques centrales cherchent un équilibre délicat : maintenir la stabilité des prix sans étouffer la croissance ni précipiter une crise de solvabilité. La Banque centrale européenne a déjà évoqué la possibilité d’ajuster sa politique de réinvestissement des titres afin de contenir les écarts de taux au sein de la zone euro. Aux États-Unis, la Réserve fédérale signale une pause dans la remontée des taux, mais reste vigilante sur le front de l’inflation.

Les gouvernements, eux, multiplient les appels à une coordination internationale. Le FMI plaide pour des restructurations « ordonnées » de dettes insoutenables et pour des mécanismes multilatéraux plus efficaces. L’Union européenne discute d’un renforcement des règles budgétaires, mais les divergences entre États membres ralentissent le processus.

Une menace durable pour la stabilité économique

La crise de la dette ne se résume pas à une équation comptable. Elle traduit un dilemme stratégique : comment financer les transitions écologique, énergétique et numérique, tout en respectant des trajectoires budgétaires crédibles. Si certains pays, comme le Portugal ou l’Irlande, ont su transformer leur notation en symbole de discipline retrouvée, d’autres restent englués dans une spirale d’endettement difficile à briser.

Pour les observateurs, le risque n’est pas celui d’un choc unique, mais d’une succession de crises locales, capables de fragiliser progressivement l’édifice financier international. Dans ce contexte, la gestion de la dette publique devient un test de crédibilité majeur pour les gouvernements et un baromètre central de la confiance des marchés.

  1. Agences de notation : Rôle des agences de notation ↩︎
  2. Institut de la finance internationale : https://www.iif.com/ ↩︎
  3. OCDE : https://www.oecd.org/fr.html ↩︎
  4. Standard & Poor’s : https://www.spglobal.com/ ↩︎
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